Nous vivons une crise climatique. Les créateurs de théâtre – comme tout le monde – veulent répondre à cette urgence. Mais pour le théâtre, la nécessité de changer est particulièrement pressante. Si le théâtre doit faire partie de la conversation la plus vitale à laquelle l’humanité est confrontée, alors il doit changer sa pratique[1].
— Paddy Dillon, The Theatre Green Book Co-ordinateur
Au printemps 2023, une réflexion conjointe avec le Trident et La Remise culturelle[2]
a été amorcée pour penser la transition socio-environnementale de nos organismes culturels vers des pratiques se voulant plus respectueuses de l’environnement et des êtres humains.
Dès les prémisses du projet, La Remise culturelle a été sollicitée pour jouer le rôle de mentor, s’engageant à accompagner La Bordée et le Trident dans les transformations devant s’opérer dans chaque sphère de leur fonctionnement, allant de la billetterie, au bar, en passant par la production.
Parmi les objectifs ciblés par ce plan, celui de réaliser une pièce porteuse de réflexions, et instigatrice d’actions écoresponsables, en ce qui a trait aux décors, costumes, systèmes d’éclairage, et bien d’autres. Pour ce faire, trois rencontres ont eu lieu, en automne dernier, en vue de former nos équipes et de les sensibiliser à leur rôle respectif vers de meilleures pratiques.
Repenser la création avec Heimat/Revenir
Afin de viser une production écoresponsable, tout concepteur doit impérativement s’arrêter afin de réfléchir à chaque décision en lien avec sa création et évaluer l’impact environnemental de ses choix. Celui-ci est appelé à se demander constamment :
« Puis-je privilégier le réemploi d’une ressource déjà existante? » ou, encore, « Quelle sera la seconde vie de la matière que j’utilise? ».
Pour Heimat/Revenir, ce travail a impliqué un dévouement soutenu de la part de l’équipe de production qui devait dès lors consacrer un temps considérable à repenser ses méthodes pour trouver des solutions plus saines, en phase avec les préoccupations humaines et environnementales du théâtre.
Quelques exemples de nos réussites
Bois durable
Une partie du bois utilisé pour la fabrication des décors est certifié FSC (Forest Stewardship Council). Cette mention promet que le bois provient de forêts gérées de manière durable, où la coupe sélective est privilégiée, et où aucune coupe à blanc n’est effectuée. Le reste du bois a été récupéré dans une scierie de la région, les concepteurs ayant opté pour travailler à partir d’une matière brute, non altérée par des produits nocifs à l’environnement.
Assemblage ingénieux
L’ensemble des éléments de décors ont été assemblés mécaniquement à l’aide de vis et nulle colle n’a eu à être utilisée. En privilégiant ce procédé, la production s’est assurée que les décors puissent facilement être démontés, sans risque d’endommager les matériaux. À la fin des représentations, le bois sera remis à disposition du milieu culturel et sera déjà prêt au réemploi.
Havre vert
Pour éviter la création de nouveaux déchets plastiques, la production a réalisé un mur végétal à partir de plantes naturelles, auxquelles ont été ajoutées quelques plantes d’occasions, fait de matière synthétique. Dans l’idée que ces plantes naturelles circulent, elles aussi, le plus longtemps possible, une deuxième vie leur a déjà été prévue; elles seront léguées à un organisme culturel et à des fleuristes qui les prendront pour un usage futur. Dans le pire des cas, cette végétation pourra être entièrement compostée.
Nouvelles couleurs
La sélection de la peinture a été minutieusement repensée dans le but de minimiser au maximum l’empreinte environnementale. Plutôt que de recourir à des produits communs issus de la pétrochimie, comme les peintures acryliques, au latex et à l’huile, mais dont les composants engendrent une pollution considérable lors de leur extraction, les concepteurs ont fait le choix judicieux de se restreindre à l’utilisation de peintures naturelles. Parmi ces alternatives, des peintures à base de caséine, minérale, et de brou de noix ont été privilégiées.
Ces mesures, soigneusement mises en œuvre, s’inscrivent dans une démarche visant à atténuer l’impact environnemental de la production de Heimat/Revenir, mais posent également les bases d’une pratique théâtrale plus durable, respectueuse et saine, qui aspire à l’écoconception. Bien que des chiffres précis ne soient pas encore disponibles, ces initiatives sont prometteuses quant à la réduction significative de l’empreinte écologique de cette production et témoignent de la volonté de La Bordée, du Trident et de La Remise culturelle d’engendrer un tournant au sein de l’écosystème culturel.
Ce projet est rendu possible grâce au soutien du Conseil des arts et des lettres du Québec et la Ville de Québec, en collaboration avec Culture Capitale-Nationale et Chaudière-Appalaches.
Crédit photo : Vincent Champoux
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[1] Ce texte a été librement traduit. Voici la version originale : ‘’We’re living in a climate crisis. Theatre makers – like everyone else – want to respond to that emergency. But for theatre, the need to change is particularly urgent. If theatre is to be part of the most vital conversation humanity faces, then. it has to change its practice.’’ (Theatres Trust et coll. The Theatre Green Book, p.2, [En ligne]. https://theatregreenbook.com/)
[2] La Remise culturelle est un organisme travaillant pour l’ensemble du milieu. Sa mission consiste à accompagner les artistes vers de meilleures pratiques, à rendre disponible du matériel à moindre coût, à optimiser la gestion des ressources, le tout dans le but de minimiser l’impact environnemental de la sphère culturelle. (La Remise culturelle. Mission, [En ligne]. https://laremiseculturelle.ca/#mission)
