Bonjour Marie-Ginette,

 

Merci d’avoir accepté de répondre à quelques questions. C’est un réel plaisir de pouvoir échanger avec vous afin de mettre la table autour de la pièce Apologia.

 

D’entrée de jeu, comment vous identifiez-vous à votre personnage de Kristin, cette femme, qui semble à la fois susciter la peur et l’admiration chez son entourage?

 

Marie-Ginette : Je crois, que comme Kristin, je suis habitée par une profonde foi en l’art. Maintenant les nuances et les exigences de cet engagement se trouvent dans l’écriture de l’auteur, Alexi Kaye Campbell.

 

En effet, Kristin est quelqu’un empli de convictions, mais elle est aussi très dure et exigeante envers les autres, vous a-t-elle touchée d’une manière particulière, par son histoire ou par ce qu’elle représente?

 

Marie-Ginette : Oui, bien sûr qu’elle m’a touchée. Son intransigeance est à la fois sa force et sa faiblesse. Incarner ce personnage c’est s’abandonner à ce paradoxe.

 

Pouvez-vous nous en dire plus sur vos sources d’inspirations pour la création de celui-ci? Y a-t-il des figures marquantes de votre vie, des modèles de femmes combatives, qui vous évoquent Kristin et qui ont contribué à votre compréhension de son caractère et de son parcours?

 

Marie-Ginette : Plusieurs femmes peuvent être inspirantes, toutes celles qui nous ont précédés servent d’inspiration à différents niveaux : que ce soit Simone Weil, Madeleine Parent, Pauline Marois, Françoise David, les femmes qui ont participés au Refus global (Madeleine Arbour, Marcelle Ferron, Muriel Guilbault, Françoise Sullivan…), et bien sûr le parcours de Kristin décrit par l’auteur.

 

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Tout au long du spectacle, on comprend que Kristin fut une précurseure, une figure de changements, une révolutionnaire, au même titre que Giotto, un artiste à qui elle a consacré sa carrière et dont elle admire le travail. Connaissiez-vous ce peintre auparavant? Et selon vous, en quoi cet amour pour Giotto nous en apprend sur le personnage de la pièce et sur ce qu’elle nomme ses « motivations profondes »?

 

Marie-Ginette : Je crois que sa dévotion pour Giotto est à l’image de son engagement dans l’art. L’art comme porteur de sens, chercheur de sens dans ce monde que nous souhaitons meilleur. Et oui, je connaissais l’existence de Giotto mais j’ai découvert son importance et sa portée dans l’histoire grâce au personnage de Kristin.

 

Diriez-vous que l’art occupe une place différente dans la société d’aujourd’hui? Notre rapport à celui-ci a-t-il beaucoup évolué au fil des époques? Qu’en est-il de votre rapport personnel à votre métier de comédienne?

 

Marie-Ginette : Pour moi, l’art occupe une place centrale dans ma vie puisque j’en ai fait mon métier. Je crois que cette activité humaine peut contribuer à modifier notre regard sur le monde, nous aider à chercher un sens à la vie. Elle peut aussi tout simplement nous rassembler, nous faire sentir notre condition commune d’humain à humain.

 

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En écoutant la pièce, on réalise que les relations que Kristin entretient avec ses fils et ses belles-filles sont toutes très singulières. Les dynamiques entre les différents personnages ont-elles posé des défis particuliers pour votre jeu?

 

Marie-Ginette : Dynamique est un mot bien choisi parce qu’il s’agit d’un véritable théâtre d’action d’émotions. Le « ping-pong » entre les personnages est percutant et incisif. Ça demande de l’écoute et de l’agilité.

 

Et que pensez-vous des rapports de Kristin avec la génération suivante, que nous pourrions nommer les descendants des baby-boomers? Où résident les plus grands écarts entre ces deux générations et la cause de certains conflits que nous voyons survenir dans la pièce?

 

Marie-Ginette : Je crois qu’il y a un véritable débat sur les valeurs qui concerne toutes les générations. Et dans la pièce on sent le jugement de Kristin sur la société d’aujourd’hui qu’elle juge moins porteuse de rêves que sa génération. Mais elle est elle-même traversée par le temps présent.

 

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La prémisse des générations qui oublient les luttes de leurs prédécesseurs revient souvent dans la pièce. De votre point vu personnel, est-il vrai qu’on oublie?

 

Marie-Ginette : On pourrait le penser mais je vous laisse le soin de répondre à cette question.

 

En terminant, qu’est-ce que les gens peuvent s’attendre à vivre en venant voir Apologia

 

Marie-Ginette : Je pense que les gens sont invités à suivre les péripéties d’un souper d’anniversaire pas comme les autres. À découvrir des personnages entiers qui se livrent au rythme de leurs jugements, de leurs conflits, de leurs engagements et surtout au rythme des liens qui les unissent.

 

Merci infiniment pour votre partage.

 

Crédit photo : Nicola-Frank Vachon